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Victor Hugo : Hernani

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Biographie sommaire de l'auteur

Victor Hugo (1802-1885) est un monument de la littérature française. Auteur prolixe et éclectique, il s’est illustré dans tous les genres. Chef de file du Romantisme, il est aussi engagé politiquement et socialement. 

Hugo fait des études de Droit. Il est remarqué par l’Académie française lors d’un concours de poésie, puis par le roi Louis XVIII pour un poème qui évoque les circonstances de la mort de son neveu dans un attentat. 

Dès son plus jeune âge, sous l’égide de sa mère, Victor Hugo est ultraroyaliste sous la Restauration ; puis, influencé par son père, général d’Empire, il découvre l’aura de Napoléon Iᵉʳ. Il est nommé Pair de France par Louis-Philippe en 1845 sous la Monarchie de Juillet.

Élu député en 1848, il se pose en orateur de « gauche » à l’Assemblée et défenseur des libertés sous la IIe République. D’abord appui de Louis-Napoléon Bonaparte lors de son élection, trois ans plus tard, il s’opposera à lui au moment du coup d'État du 2 décembre 1851.

Pendant les vingt années du Second Empire, il doit partir en exil : à Bruxelles, puis dans l’île de Jersey, puis à Guernesey. Cet exil politique forcé est l’une des périodes les plus propices à l’expression de son génie littéraire. Fervent républicain, Victor Hugo dénonce le régime de Napoléon III à distance. Il rentre en France après 19 ans d’exil, juste après la proclamation de la IIIe République en 1870. Jouissant d’un prestige mondial, il est accueilli en France par le peuple, en héros républicain. Il milite pour l’amnistie des Communards, ce qui lui vaut un autre exil à Bruxelles puis au Luxembourg.

Il revient à Paris en 1872. En 1876, il est sénateur. L’Odéon et le Théâtre Français célèbrent le dramaturge par la reprise de ses deux imminents drames que sont Hernani et Ruy Blas.

Victor Hugo décède le 15 mai 1885 d’une congestion pulmonaire. Son prestige culturel au sens large est salué lors de funérailles grandioses au Panthéon.

Bibliographie sommaire de l'auteur

1- Sa Dramaturgie

Victor Hugo est le chef de file des Romantiques et le promoteur du drame romantique avec, entre autres, Marion De Lorme (pièce censurée en 1829), Hernani en 1830 et Ruy Blas en 1838. Il théorise le genre du drame romantique dans sa préface de Cromwell (1827) qui sert de manifeste à ce nouveau style théâtral : versification disloquée, absence de règle des 3 unités, mélange du grotesque et du sublime, du lyrisme et du prosaïsme.

2- Son œuvre romanesque

La plupart de ses romans, à toile de fond historique, est engagée socialement. Le Dernier jour d’un condamné (1829) milite contre la peine de mort, Notre Dame de Paris (1862) est une œuvre magistrale destinée à attirer l’attention de l’opinion publique sur la conservation du patrimoine, Les Misérables (1866) et Les travailleurs de la mer (1874) se focalisent sur le fléau de la misère sociale.

3- Son œuvre poétique

En poésie, ses productions oscillent entre la veine exotique avec Les Orientales (1829), polémique avec les vers satiriques contre Napoléon III dans Les Châtiments (1853), lyriques avec Les Contemplations (1856) où il évoque la mort par noyade de sa fille Léopoldine, et même épique avec La Légende des siècles (1883) qui vise à réécrire l’histoire de l’humanité.

Par ailleurs, on lui attribue la création de journaux : Le Conservateur littéraire puis L’Événement. En plus d’être rédacteur en chef, Victor Hugo est également dessinateur.

L'œuvre intégrale

1- De la genèse d’une pièce théâtrale « à polémiques »

a- La « bataille d’Hernani » : Ce qui est à l’origine de la « bataille » est l’écriture elle-même : Hugo prône une liberté dans l’art et se plaît à déconstruire l’esthétique classique (alexandrin canonique, règle des 3 unités et bienséances sont malmenées).

C’est dans la préface de Cromwell, publiée en 1827, que Hugo va définir les principes du Drame romantique. En 1829, sa pièce Marion De Lorme est interdite par le pouvoir royal. Il se hâte d’écrire Hernani en moins d’un mois afin de faire enfin triompher un drame romantique sur scène.

Le censeur Brufaut, qui a fait interdire Marion De Lorme, change de stratégie pour Hernani : il autorise la pièce mais compte sur le rejet du public. Il discrédite publiquement la pièce et appelle aux sifflets, aux quolibets pendant les représentations. La première représentation de la pièce eut lieu à la Comédie-Française, à Paris, le 25 février 1830.

Alors que le jeune public romantique exulte et applaudit, les classiques, « larves du passé » selon Théophile Gautier, critiquent, huent, se retournent, perturbent les acteurs.

Au bout du compte, il faut dire que le succès de la pièce semble passer par sa remise en cause.

b- La structure de la pièce théâtrale : Le dramaturge a délibérément choisi de donner des titres à ses actes. Les titres des trois premiers actes (le roi, le bandit, le vieillard), permettent de comprendre autour de quel personnage gravite l’action dramatique et ses nœuds. Ils sont, d’une certaine façon, programmateurs et annoncent l’issue de l’acte. Ils mettent également en exergue l’action principale en se concentrant sur les trois prétendants de Doña Sol. Les titres de l’acte IV et V sont plus énigmatiques, non pas programmatiques, mais simplement thématiques (le tombeau, la noce) : ils ancrent successivement l’intrigue dans la grande Histoire (le tombeau de Charlemagne et l’élection de Don Carlos) pour revenir à la petite histoire d’amour dans le dernier acte et permettre le dénouement de l’intrigue amoureuse, sans jamais informer l’issue d’avance. Le titre de l’acte V se révèle même antithétique puisque la noce est le prélude non pas d’une vie à deux mais d’une triple mort tragique...

2- Le résumé de l’œuvre

L’histoire est la suivante : Hernani, un jeune noble banni, aime Doña Sol qui l’aime en retour. Cependant, deux hommes se dressent contre leur amour : le roi Don Carlos qui aime Doña Sol en secret et son oncle Don Ruy Gomez à qui elle est promise. Après que le roi a enlevé la femme qu’il aime, Hernani et Ruy Gomez s’allient pour la récupérer. Hernani promet de vouer sa vie et son bras au service du noble.

Mais lorsque le roi devient Empereur, il leur pardonne à tous les trois et accepte l’union des deux amants. La fin est tout de même tragique, car l’oncle réclame le respect du pacte passé avec Hernani, qui n’a d’autre choix que de s’empoisonner (plutôt que de quitter Doña Sol). Elle s’empoisonne avec lui et son oncle se poignarde en les voyant tous les deux morts.

3-Les principaux personnages

Hernani : Personnage éponyme de la pièce, c’est un noble banni et l’amant de doña Sol. Il hait don Carlos qui a condamné son père à mort ;
Don Carlos : Roi d’Espagne et futur Charles Quint.
Don Ruy Gomez de Silva : Duc de Pastrania, vieillard amoureux, c’est l’oncle de doña Sol qu’il veut épouser.
Doña Sol de Silva : Amante d’Hernani, elle est destinée au mariage avec son oncle don Ruy Gomez de Silva.

Les thèmes majeurs abordés dans l’œuvre

  • L’amour : C’est un thème incarné par l’ensemble des personnages. L’intrigue amoureuse réunit les trois prétendants aux profils éclectiques auprès de Doña Sol : Hernani, Don Carlos et Don Ruy. Don Carlos, séducteur et harceleur, fait penser au Comte Almaviva qui veut exercer son droit de cuissage sur Suzanne, femme de Figaro dans Le Mariage de Séville. Don Ruy, quant à lui, rappelle les vieux barons de comédie qui cherchent la compagnie des jeunes filles. Ces deux amoureux éconduits sont stigmatisés au profit d’un seul héros lyrique : Hernani.

    L’amour véritable est partagé par Doña Sol et Hernani. Ce dernier incarne le héros romantique par excellence : rebelle, maudit, proscrit, jeune, beau, fougueux, il promet à Doña Sol un amour fou car il est prêt à toutes les audaces et tous les sacrifices. Il s’emporte à la vue de Doña Sol en robe de mariée et se lance dans une scène de jalousie suicidaire à l’acte III, scène 3. Imprévisible, farouche et authentique, il est démesuré dans ses actes et dans ses paroles. Doña Sol, présentée comme une jeune première timide, « chaste et pure » (I, 3), « calme et belle » (III, 4) ; joue également le rôle d’une amoureuse farouche lorsqu’elle accepte la fuite proposée par Hernani (I, 2) ou quand elle subtilise le poignard du roi. (II, 2) L’amour sincère porté à Hernani semble la transfigurer pour la rendre audacieuse et téméraire. Leur funeste fin est un simulacre de nuit de noces tragique.

  • Le pouvoir : le pouvoir ici est incarné par Don Carlos et Don Ruy.
    Don Carlos se caractérise par une forme de dualité : un « bandit » (II, 2) ou un « mauvais roi » (III, 6) d’après Doña Sol, mais aussi le bon empereur, magnanime, qui octroie son pardon à Hernani et aux conjurés à l’acte IV. Il incarne à la fois la tromperie et le dévouement. Par deux fois, il se fait passer pour Hernani afin d’approcher Doña Sol (I, 1 et II, 2) et met son rang de roi au service de ses aventures galantes. Il fait alors preuve d’égoïsme et d’immaturité. En revanche, il prend son rôle de futur empereur à cœur, comme le prouvent ses deux monologues délibératifs de l’acte IV (scènes 2 et 5). L’acte IV transfigure le personnage par sa communion fantasmée avec Charlemagne. Il prend alors une stature politique mais aussi une grandeur morale.

    Don Ruy incarne, lui aussi, les contraires. Oncle protecteur, il devient le mari redouté par Doña Sol. Dévalorisé, présenté comme un « vieillard », il détient pourtant un certain pouvoir dramaturgique à l’acte III. Il est alors maître des destins d’Hernani, de Doña Sol et de Don Carlos. Ses longues tirades à répétition le cantonnent au rang de moraliste, dépositaire de l’ordre. Or, son désordre intérieur est patent : son projet d’épouser sa nièce l’assimile aux barons ridicules de comédie qui convoitent une jeune fille qui ne les aime pas. Si l’acte III, le positionne en bon chrétien, garant de l’hospitalité, chantre de la mesure, cela ne l’empêche pas de sombrer dans la folie meurtrière : l’alliance avec Hernani pour tuer le roi en témoigne, mais aussi le cor dont il se sert pour sonner le glas d’Hernani.

    Il ne serait pas faux de dire qu'Hernani lui aussi est détenteur d’une certaine forme de pouvoir, compte tenu de son statut de « chef des montagnards ». D’une certaine manière, il passe pour un opposant du pouvoir officiel.
  • L’honneur : cette thématique est le moteur même de la pièce ; son sous-titre l’illustre bien : Hernani ou l’honneur castillan. C’est la raison d’être du personnage d’Hernani qui souhaite laver l’honneur de son père. L’honneur l’emporte d’ailleurs sur l’amour dans la scène ultime : Hernani ne peut se résoudre à ne pas tenir sa parole, ce qui reviendrait à ternir la mémoire de son père. Don Ruy le manipule en faisant référence à son serment et à la nécessité de l’honorer. Cela fonctionne, Hernani refuse de se voir devenir « faussaire, et félon, et parjure » (V, 6). En effet, dans l’Espagne du XVIe siècle, l’honneur compte plus que la vie.

    Don Ruy est également dépositaire du sens de l’honneur, à certains moments. Par exemple, lorsqu’il se refuse à livrer Hernani à Don Carlos à l’acte III, en vertu de sa promesse d’hospitalité. Il serait bien plus commode pour lui de se débarrasser de ce rival importun, mais il tient la parole qu’il a donnée au pèlerin, même face à son roi.

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