Corrigé de l'épreuve de Français

Voici une proposition de corrigé.

 I. Compréhension et compétences d’interprétation

1. Choisissez le résumé correspondant à cet extrait. Justifiez votre choix en vous appuyant sur deux citations que vous expliquerez. (5 points)

Elmire fait parler Tartuffe tout en repoussant ses avances pour que son mari Orgon le chasse de chez lui. En effet, ce dernier la séduit dans sa propre maison en se faisant passer pour l’ami d’Orgon. Mais Elmire feint d'accepter ses avances tout en lui résistant : « Mais comment consentir à ce que vous voulez, Sans offenser le ciel, dont toujours vous parlez ? », ce qui montre qu'elle le pousse à révéler son hypocrisie et sa volonté de la séduire malgré ses convictions religieuses. Enfin, sa toux répétée « Elmire tousse plus fort » constitue un signal destiné à Orgon caché sous la table pour qu'il réagisse et intervienne face à la tromperie de Tartuffe.

2. Expliquez quels sont les deux aspects de la situation qui choquent Elmire dans ses deux premières répliques (vers 1 à 10, vers 13 à 14). Vous vous appuierez sur deux citations. (4 points)

Le premier aspect qui choque Elmire est la violence tyrannique de l'amour de Tartuffe qui l’amène à être trop insistant et trop pressant : « Mon Dieu ! que votre amour en vrai tyran agit ! » et « qu'avec violence il veut ce qu'il désire ! ». Elmire dénonce ainsi le caractère brutal des sentiments de Tartuffe qui n’obéit qu’à ses désirs : « de votre poursuite on ne peut se parer, Et vous ne donnez pas le temps de respirer ? ». 

Ensuite, le comportement de Tartuffe est en contradiction avec sa foi en poussant Elmire à l’adultère : « Mais comment consentir à ce que vous voulez, Sans offenser le ciel, dont toujours vous parlez ? »

3. Dans les vers 19 à 30 :

a) Quels sont les deux arguments qu'utilise Tartuffe pour convaincre Elmire de surmonter ses « craintes ridicules » (vers 19) ? (2 points)

Tartuffe utilise deux arguments principaux. Le premier est sa capacité à pouvoir résoudre les questions relatives à la bonne conscience ou à la moralité : « je sais l’art de lever les scrupules », le deuxième à arranger et à manipuler les règles imposées par la religion : « Mais on trouve avec lui des accommodements ». Il suggère qu'il existe des arrangements possibles avec les interdits religieux afin de « rectifier le mal de l’action » par de bonnes actions. Enfin, il prend l’entière responsabilité de la situation : « prends le mal sur moi ».

b) Identifiez et expliquez un procédé qui met en valeur ces arguments. Vous pourrez vous appuyer sur les rimes ou sur les modes verbaux ou sur le sens des verbes présents dans les vers 19 à 30. (2 points)

Le discours de Tartuffe contient des présents de vérité générale (« Le ciel défend », « on trouve ») qui donnent à sa démonstration une forme de légitimité. Tartuffe s’appuie sur la science et emploie  l'euphémisme « certains contentements » pour évoquer les plaisirs charnels. Il utilise des termes détournés comme « accommodements », « science d'étendre les liens de notre conscience » pour justifier moralement l'immoralité. 

4. « Oui, je suis au supplice » (vers 33) :

a) Expliquez comment chacun des deux personnages comprend le mot « supplice ». (4 points)

Elmire comprend le mot « supplice » comme désignant la torture qu'elle endure en devant jouer cette comédie répugnante pour convaincre Orgon qui tarde à sortir de sa cachette, alors que Tartuffe l’interprète comme l’aveu de l’amour d’Elmire, qui souffre secrètement de devoir cacher ses sentiments pour lui et de devoir lui résister. 

b) Quel autre jeu de mots est utilisé dans les vers 35 et 36 ? Expliquez-le. (2 points)

Le jeu de mots porte sur « rhume obstiné » qui renvoie à l’entêtement de Tartuffe à la séduire. Elmire utilise la métaphore de la maladie pour critiquer avec ironie l’insistance de Tartuffe, suggérant que son mal (la présence de Tartuffe) ne peut être soigné par ses remèdes (le « jus de réglisse »).

5. Que peut ressentir Orgon, caché sous la table, en écoutant cette conversation ? Vous nommerez deux sentiments. Vous justifierez votre réponse à partir d'indications du texte. (6 points)

Orgon peut sans doute ressentir de la colère et de la honte ou encore de l’indignation en découvrant la tromperie et la trahison de celui qu’il considérait comme un homme respectueux de la religion, alors qu’en réalité Tartuffe n’est qu’un hypocrite qui détourne les règles de la foi en sa faveur : « Le ciel défend, de vrai, certains contentements ; Mais on trouve avec lui des accommodements » et qu’il a abusé de sa faiblesse : « Et d'abuser ainsi, par vos efforts pressants/Du faible que pour vous vous voyez qu'ont les gens ? ».

Orgon peut ressentir de la surprise face à cette révélation d’avoir été dupé par un homme qui lui a vanté les principes de la morale religieuse alors qu’il les enfreint en secret : « Et ce n'est pas pécher que pécher en silence. » 

Enfin, Orgon peut se sentir abattu par la trahison de son ami qui est en train de séduire sa propre épouse et de l’inciter à le tromper en secret : « Enfin votre scrupule est facile à détruire./Vous êtes assurée ici d'un plein secret. » 

6.Image

a) Pourquoi, selon vous, le metteur en scène a-t-il choisi de ne pas mettre de nappe sur la table ? Vous formulerez deux hypothèses. (2 points)

Dans cette photographie issue de la représentation du Tartuffe par Denys Podalydès, le metteur en scène Ivo Van Hove a choisi de ne pas mettre de nappe pour créer un effet de transparence symbolique : la table nue est le reflet du dévoilement de la vérité, de la révélation de la véritable identité du Tartuffe, qui est mise à nue : Orgon découvre l’hypocrisie de son prétendu ami. 

Cette mise en scène permet aussi au public de mieux voir Orgon dissimulé sous la table, afin de pouvoir percevoir ses émotions au moment de la révélation, alors que pour les personnages, ce dernier n’est pas visible. 

b) Selon vous, à quel moment de la scène que vous avez analysée, Orgon lance-t-il un tel regard sur Tartuffe et Elmire ? Appuyez-vous sur le texte, l'expression du visage et la posture de l'acteur. Justifiez précisément votre réponse. (5 points)

La photographie présente Orgon de profil afin de révéler son expression au moment de la révélation : il semble furieux et indigné comme l’indiquent les sourcils froncés, les yeux grands ouverts, écarquillés, la bouche qui présente un sourire inversé et entrouverte (signe de mécontentement et de stupéfaction) et la tête légèrement en avant par rapport aux épaules. Le moment peut alors correspondre au point culminant de la démonstration de Tartuffe, celui où il comprend qu’il a été trompé par un hypocrite qui incite sa femme à céder librement à ses avances : « Vous n'avez seulement qu'à vous laisser conduire./Contentez mon désir, et n'ayez point d'effroi;/Je vous réponds de tout, et prends le mal sur moi. ». En effet, il ne parvient pas à sortir de sa cachette malgré la toux d’Elmire qui a pour but de l’inciter à réagir. 

II. Compétences linguistiques et grammaticales

7. « Mais on trouve avec lui des accommodements » (v. 22)

a) Donnez la fonction de « des accommodements ». (1 point)

« des accommodements » est complément d'objet direct du verbe « trouve ».

b) Pour prouver votre réponse, nommez et réalisez deux manipulations. (2 points)

Le complément d’objet direct n’est pas supprimable ni déplaçable. Il peut être remplacé par un pronom personnel « les » : « On les trouve avec lui » et il devient sujet à la voix passive : « Des accommodements sont trouvés avec lui ». 

8. « Contentez mon désir » (vers 29).

a) Donnez le mode et le temps du verbe. (1 point)

« Contentez » est un impératif présent. 

b) Indiquez la valeur d'emploi du mode. (1 point)

L’impératif présent exprime la prière. 

9. « effroi » (vers 29)

a) Donnez un verbe et un adjectif de la même famille. (1 point)

Le verbe « effrayer » et l’adjectif « effrayant » appartiennent à la même famille qu’ « effroi ».

b) Donnez un synonyme et un antonyme. (2 points)

Le synonyme d’ « effroi » est « terreur », « peur » ; son antonyme est « confiance », « calme », « tranquillité ».

10. Réécrivez le passage suivant en remplaçant « votre amour » (vers 1) par « vos amours ». Faites toutes les modifications nécessaires. (10 points)

« Mon Dieu ! que vos amours en vrais tyrans agissent ! 

Et qu'en un trouble étrange elles me jettent l'esprit ! 

Que sur les cœurs elles prennent un furieux empire ! 

Et qu'avec violence elles veulent ce qu'elles désirent ! »

III.Rédaction

Sujet d’imagination

Il s’agit de la rédaction d’un monologue théâtral : il faudra donc respecter les codes du genre (prise de parole seule, possibilité de didascalies, ton dramatique). Le personnage s’exprime à la première personne, ancré dans la situation d’énonciation.

L’emploi des temps de l’énonciation correspond au présent pour traduire la prise de conscience immédiate, à l’imparfait ou au passé composé pour évoquer les faits passés.

Le texte doit mêler discours narratif (il se remémore les faits) et discours argumentatif (il réfléchit à ses erreurs, doute, se justifie, s’indigne).

Le vocabulaire des émotions et des sentiments (colère, honte, regret) est attendu avec des indications scéniques concernant la gestuelle, le déplacement, ainsi qu’un ton pathétique ou tragique, pour finir sur une décision définitive sur ce qu’il envisage de faire.

Sujet de réflexion

Le sujet porte sur le programme de 3e concernant le rôle de l’art dans la critique des travers de la société. Il s’appuie sur la culture générale et artistique des élèves, en particulier sur les œuvres (littéraires, picturales, cinématographiques, musicales…) qui utilisent l’humour ou le rire pour dénoncer les défauts humains ou sociaux.

Les artistes peuvent se servir du comique (satire, ironie, parodie, caricature…) pour faire réfléchir le public, tout en le faisant rire : castigare ridendo mores (« châtier les mœurs par le rire »). Ce procédé rend souvent la critique plus accessible. Le rire devient alors un outil de dénonciation efficace, parfois plus fort et plus puissant que des discours sérieux, tout en veillant au respect de l’intégrité de l’autre. On ne peut pas toujours rire de tout : le rire peut avoir des limites. 

Quelques exemples possibles :

• Molière, Tartuffe ou L’Avare, critique l’hypocrisie religieuse ou de l’argent par des personnages ridicules ; Le Malade imaginaire sur l’incompétence des médecins. 
• Les caricatures de presse (comme celles de Charlie Hebdo) utilisent l’humour noir ou absurde pour dénoncer des abus de pouvoir ou des injustices.
• La bande dessinée Les Aventures de Tintin comporte aussi des critiques sociales sous une forme légère.
• La série de romans graphiques L’Arabe du Futur de R. Sattouf, autobiographie au ton parfois léger pour évoquer des événements traumatiques vécus par l’auteur.
• Le film Le Dictateur de Charlie Chaplin tourne Hitler en ridicule pour mieux dénoncer la dictature.
• La série de romans graphiques L’Arabe du Futur de R. Sattouf, autobiographie au ton parfois léger pour évoquer des événements traumatiques vécus par l’auteur.
• Le film Le Dictateur de Charlie Chaplin tourne Hitler en ridicule pour mieux dénoncer la dictature.
• Le roman Candide de Voltaire utilise l’ironie pour dénoncer la guerre, la religion fanatique et l’esclavage. Les Fables de La Fontaine, les portraits de La Bruyère dans Les Caractères…
• Des artistes modernes comme Paul Mirabel, Blanche Gardin, Guillaume Meurice, Tanguy Pastureau abordent des sujets de société avec humour : le féminisme, la politique, les inégalités homme-femme, le couple, etc.